Dimanche 27 octobre 8 h. Dernier jour à Chicago. Deux crises d’angoisse cette nuit. La première, qui m’a réveillé à 2 h du matin, je l’ai domptée sans trop de mal et j’ai réussi à me rendormir rapidement. La seconde, peu avant 4 h, est beaucoup plus violente. C’est quelque chose qui vient de loin, quelque chose de profond, comme une peur d’enfant, irrationnelle et terrifiante. Je pense me lever et sortir faire un tour, mais je sais qu’il fait sacrément froid dehors, et je ne veux pas laisser L., ni la réveiller. J’essaie de lire un peu, rien n’y fait. Mon cœur est lourd et mes mains tremblent. Je prend mon smartphone et j’essaie les infos, je lis mes mails, je consulte les réseaux sociaux. Finalement, je dois à François Bon d’avoir trouvé une sorte d’apaisement, grâce à un texte qu’il vient de publier sur Le tiers livre. Dans son récit, il imagine les corps des morts d’une grande mégapole semblable à Chicago non plus enterrés, mais simplement déposés sur les toits, confiés à la charge du vent et du soleil, fantômes veillant sur les vivants. C’est un très chouette conte de saison, une très belle idée, et j’imagine mentalement une suite, où chaque année, le 31 octobre, pour Halloween, les morts descendraient se mêler aux vivants pour s’assurer discrètement qu’ils vont bien. Et je pense à mon père, comme je pensais à lui hier soir en prenant les photos — les dernières — du skyline de Chicago, imaginant quel aurait été son émerveillement devant ces gratte-ciel majestueux.
Le texte de François m’a ramené à lui, j’ai imaginé mon père quelque part là-haut, son corps redevenu poussière balayé par les vents, et au bout du compte c’est peut-être là que je le laisserai en partant, après l’avoir porté en moi tout du long de ce voyage.
Une photo par jour : 216 — Downtown Chicago
Fragments d’un voyage : Chicago, octobre 2013
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