Sortons, dit-elle. Sortons, si tu veux bien. J’ai envie de fumer.
Une fois dehors, elle allume sa cigarette et tire longuement dessus. Il l’observe en silence.
— Pourquoi est-ce que tu me regardes comme ça ? dit-elle.
— J’ai toujours eu envie de toi, dit-il.
Elle sourit. Tu as trop bu, dit-elle. Il dit : autant que toi. J’ai bu autant que toi.
— Tu es marié, dit-elle.
— Et toi tu as quelqu’un, dit-il.
— Oui, quelqu’un que tu as longtemps considéré comme ton meilleur ami, dit-elle.
— C’est peut-être pour ça, dit-il.
— Pour ça quoi ? dit-elle. C’est parce qu’il n’est plus ton ami que tu me dis ça ce soir ?
— Non, dit-il. C’est parce qu’il l’a longtemps été que je n’ai rien dit avant.
— Mmm… Quoi qu’il en soit, j’ai quelqu’un, dit-elle.
— Tu as quelqu’un, mais le fait qu’on ait cette discussion prouve que tu restes ouverte à d’autres propositions.
— On a cette conversation parce que tu as trop bu, dit-elle. On se connaît depuis combien de temps ? 10 ans ?
— Suffisamment longtemps pour ne plus se mentir, tu ne crois pas ? dit-il.
— Assez en tout cas pour que je ne t’envoie pas promener tout de suite, dit-elle. Mais tu te trompes si tu penses que j’ai envie de coucher avec toi.
— C’est toi qui l’as dit, dit-il.
— Dit quoi ?
— C’est toi qui parles de coucher ensemble, dit-il. Moi j’ai seulement dit que j’avais toujours eu envie de toi.
— Tu joues sur les mots, dit-elle, amusée, en le fixant avec un air de défi.
— Surtout quand tu me regardes comme ça, dit-il.
— Eh bien ? dit-elle.
— Quand tu me regardes comme ça, j’ai envie de toi, dit-il.
Elle tend le bras et lui prend la main. Il se penche et l’embrasse. Furtivement, une première fois, puis à nouveau, plus longuement. Après, ils restent un moment assis côte à côte.
— Tu as raison, finit-il par dire : j’ai trop bu.
— Moi aussi j’ai trop bu, dit-elle.
Elle sourit, mais ce sourire ne semble pas être pour lui. Elle sourit comme pour elle-même.
Il baisse les yeux et ne dit rien.
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