Nous avons quitté San Luis Obispo tôt ce matin, peu avant huit heures, et avons rejoint rapidement par la 101 la route 58, plus pittoresque que la 46 d’abord envisagée. À peine sortis de la ville, nous nous sommes retrouvés en pleine campagne, au milieu de zones rurales, croisant au fil des miles avalés des fermes isolées, perdues au milieu de nulle part — maison en bois, enclos pour les bêtes, pick-up garé sur le côté, et personne en vue.
Quelques dizaines de kilomètres plus loin, nous attaquons une région plus vallonnée, aux routes en mauvais état, toujours en ligne droite, mais suivant le tracé des collines, et c’est par moment comme de gigantesques dos d’âne se succédant sur des miles et des miles, et gare au vertige si l’on arrive trop vite dans la descente !
Bien plus loin, au détour d’une route, alors que cette fois ça grimpe vraiment, et en zigzag, on nous arrête pour laisser passer un convoi exceptionnel. On attend patiemment, et pendant vingt minutes il n’y a rien, sinon Fred, le préposé qui nous a demandé d’attendre, qui discute avec le chauffeur de la voiture devant nous, puis bientôt une camionnette s’avance, avant-garde du convoi ; on nous fait signe de repartir, et nous longeons alors une vingtaine de semi-remorques proprement gigantesques et leur escorte de véhicules légers qui ouvrent et ferment la marche.
Plus bas, dans la vallée, il y a des fermes solaires implantées un peu partout. On croise également pas mal de bétail et, au beau milieu de la route, ici une biche, là un coyote. Et puis, tout à coup, le paysage change à nouveau, et c’est un derrick, puis deux, puis trois, d’abord isolés, posés là au beau milieu de grandes plaines arides, et bientôt ce sont des champs entiers de forages à perte de vue, et soudain voilà que les routes sont refaites, fini les nids de poules et les accotements non stabilisés, et c’est un ballet incessant de camions qui nous accompagne, acheminant le brut vers les raffineries. À peine le temps de s’habituer que sans transition nous quittons les paysages désertiques pour nous retrouver au milieu des orangeraies.
Sur la route, un immense panneau affirme que l’industrie pétrolière et l’agriculture verte peuvent travailler main dans la main : vœu pieux, ou prophétie autoréalisatrice ?
Enfin, nous arrivons à Buttonwillow, où nous nous arrêtons pour faire le plein et avaler un copieux petit déjeuner chez Denny’s… Buttonwillow, 42 kilomètres à l’ouest de Bakersfield, population estimée à 1508 habitants, célèbre pour ses pompes à essence, ses restaurants routiers, ses fast-foods et ses trois décharges de déchets toxiques… California dreamin’…
Une photo par jour : 192 — Californie, sur la route 58
Fragments d’un voyage : USA, octobre 2013
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