enfilades | tout un été d’écriture

C’est la nuit. À la fenêtre du second appartement du premier étage, il y a un chien (un Yorkshire). L’appartement est dans le noir. À la fenêtre du quatrième appartement du cinquième étage, il y a un chien, pas très grand non plus (peut-être un Carlin). Lui aussi, il est dans le noir. Au quatrième, à la fenêtre du premier appartement, il y a un chien : race indéterminée, taille moyenne. Il se tient à la fenêtre du salon. En dépit de l’heure tardive, le plafonnier est allumé. Dans le canapé, son maître lit un livre de Don DeLillo. Point Omega (édition Picador). Au troisième, aux fenêtres, il n’y a rien : pas un chat. Dans la chambre du deuxième appartement, on n’y voit rien. Dehors, maintenant, il pleut. On entend la pluie taper sur la vitre. Quelqu’un, un homme, se retourne dans son lit. Une femme, pieds nus, traverse dans le noir le couloir qui conduit à la cuisine, un étage plus bas et deux immeubles plus loin. Elle pousse un cri en glissant sur un jouet oublié par son fils. Elle éclate de rire aussitôt. À travers la cloison, dans l’appartement voisin, elle entend d’autres cris, un couple qui fait l’amour. On sonne à l’interphone, au même étage, mais de l’autre côté de la rue. C’est le livreur de pizza. Une Peppina (sauce tomate, mozzarella, champignons, oignons, poivrons mélangés, olives noires, tomates fraîches, origan), une commande au nom de Leard. Monsieur Leard déclenche l’ouverture de la gâche électrique. Le hall s’illumine lorsque le jeune homme entre et se dirige vers l’ascenseur. Au deuxième, monsieur Leard cherche son portefeuille. Une voiture s’arrête au feu 300 mètres plus loin. Les bureaux de l’immeuble à l’angle de la rue sont restés allumés. À l’intérieur, l’équipe chargée du ménage s’apprête à partir. Le gardien de nuit les salue distraitement. Il pense déjà au petit déjeuner qu’il prendra tout à l’heure chez Classic Bean, un breakfast burrito, œufs brouillés avec poivrons, oignons et sauce piquante. Il jette un œil dehors : dehors, il pleut toujours.


Tout un été d’écriture #37. Texte écrit dans le cadre de l’atelier d’écriture proposé par François Bon sur le tiers-livre : « construire une ville avec des mots. » Tous les auteurs et leurs contributions à retrouver ici.
(et toujours les vidéos de François Bon sur ses chaines youtube et Vimeo).


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3 réponses à « enfilades | tout un été d’écriture »

  1. Avatar de cecilecamatte
    cecilecamatte

    Bravo! Plein de belles idées. Moi j’ai un peu galéré pour celui-là…

  2. Avatar de Caroline D

    J’ai tout de suite eu envie de lire à voix haute.
    Du cinéma.
    Un parfum de Jeunet.

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