
J’ai terminé il y a quelques jours le livre de Rodolphe Barry, Une lune tatouée sur la main gauche. C’est son troisième livre consacré à un écrivain américain. Après Raymond Carver et James Agee, il s’attaque cette fois à Sam Shepard. Contrairement aux deux autres, Barry se met en scène dans son bouquin, mêlant habilement fiction et réalité. Une lune tatouée sur la main gauche vient clore une trilogie, c’est peut-être pourquoi il se permet cette fantaisie, une manière comme une autre de faire émerger l’auteur derrière les grands maîtres. Carver ne posait pas question. Agee, on le connaissait si peu qu’il intriguait. Mais Shepard ? L’image de l’écrivain est brouillée par celle de l’acteur. Mais Barry s’accroche à son sujet :
Quand j’évoque ce projet de l’incarner dans un récit, dans le style «Portrait de Sam Shepard en écrivain» les réactions en disent long:
— L’acteur? Pourquoi, il écrivait?
Enfin, pardon, ce n’est pas non plus Faulkner!— Si vous voulez…
Heureusement, il y a celle de cet ami écrivain:
— Shepard? Évidemment!
Mais la réaction qui persiste et que j’entends sans même qu’on ne dise rien :— Mais toi, encore une fois, où es-tu là-dedans?
Tout ça ajoute à ma détermination. J’ai ma logique.
Tous, nous avons nos logiques qui guident nos livres que les autres parfois ne comprennent pas. Barry a raison. Et plusieurs fois ces derniers temps j’ai repensé à mon Brian Wilson qui dort dans un fichier. Un de ces projets vers lequel je reviendrai peut-être un jour.
Motel Valparaiso sort dans un mois, il est temps de réfléchir au prochain livre. Sans doute pas Brian Wilson. Deux autres livres au moins sont en chantier, mais tout reste à faire. Il y en a un qui me fait vibrer plus fort. J’en ai relu quelques pages ces derniers jours. Le même sentiment à la relecture qu’évoqué par Barry, encore, dans son livre :
Il a ressorti la pièce sur la mort de son père mise en chantier dix ans plus tôt, abandonnée, puis reprise plusieurs fois. (…)
Sam aime cette période de révision. Du temps a passé, il a évolué, les mots doivent être ajustés pour coller à sa vision des choses. Parfois, de nouveaux territoires s’ouvrent, un sens caché se révèle, prend vie, et s’impose. Il pourrait écrire et réécrire ainsi une pièce jusqu’a la fin de sa vie.
Il est temps d’écouter mon instinct, revenir à ce livre trop longtemps repoussé. M’enfoncer dans ma forêt profonde.
À l’écoute :
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