
En triant mes photos prises l’été dernier, je suis tombé sur celle-ci, qui m’a aussitôt fait penser à Saul Leiter. Souvent, je pense à Saul Leiter. J’aime feuilleter ses livres, j’y puise inspiration et réconfort. Il y a quelque chose de fragile et de magique dans ses images, tout tient dans une sorte d’équilibre instable ; quelques touches de couleurs, un cadrage, une façon de voir le monde qui n’appartient qu’à lui.
J’ai regardé une nouvelle fois l’autre soir le film In no great hurry, le documentaire qui lui est consacré. Drôle de bonhomme. Grincheux parfois, souvent drôle, d’une modestie incroyable.
C’est assez étrange, et triste, de le voir déambuler dans son appartement new-yorkais, envahi par la poussière et le désordre. Les tables, les chaises, les étagères, les sols sont envahis de boîtes en tous genres, négatifs, tirages photos, archives, livres, tableaux et sacs en papier. Rien n’est classé, les choses s’empilent, jetées pêle-mêle. Seul le chat semble ici retrouver son chemin.
En 2015, deux ans après sa mort, François Halard a pu se rendre dans l’appartement et le photographier avant qu’il ne soit entièrement refait. L’appartement est vide, sauf pour quelques pièces de mobilier, une chaise haute, une table, des abat-jour en papier, une light box, une boîte de papier Kodak, un chapeau.
Il prend tout ça en photo, glisse ici où là des tirages papier de Leiter, des tableaux qu’il a peints, ses appareils photo. Il en fait un livre. L’appartement est vide, mais l’âme de Saul Leiter s’attarde encore, flâne un peu. Rien ne presse. In no great hurry.
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